La pliométrie au service du saut (1ère partie)

- La pliométrie est une succession d’étirement-raccourcissement afin de restituer une force emmagasinée avec un temps de contact compris entre 0,15 et 0,25 secondes.
- Le cycle Etirement-raccourcissement (CEC) est appelé SSC en anglais pour Stretch-shortening cycle
- La pliométrie est une méthode d’entrainement très utile pour augmenter sa hauteur de saut mais aussi sa force réactive
- Tous les tissus sont impactés dans cette méthode, de l’os au muscle en passant par le tendon.
- La pliométrie met en jeu des phénomènes biomécaniques, neurophysiologiques et énergétiques.
La pliométrie : définition et fondamentaux
C’est une méthode d’entraînement qui repose sur des mouvements explosifs et dynamiques, conçus pour améliorer l’explosivité et la puissance musculaire. Ce type d’entraînement utilise le cycle d’étirement-raccourcissement (SSC = stretch-shortening cycle). Les exercices pliométriques, tels que les sauts verticaux, les sauts en profondeur, les bonds, les sauts unipodaux, etc… exploitent ce cycle pour maximiser la production de puissance.
Le Cycle d’Étirement-Raccourcissement (SSC)
Le SSC est un phénomène physiologique essentiel au fonctionnement de la pliométrie. Il se compose de 6 phases distinctes :
- Phase de momentum initial : l’énergie cinétique accumulée par le mouvement précédent sera le point de départ de l’analyse d’un saut.
- Phase de pré-activation : les muscles des membres inférieurs s’activent en anticipation de l’atterrissage. Il y a une augmentation de la raideur musculaire.
- Phase de réponse neuromusculaire : temps de latence durant lequel le système nerveux perçoit et réagit aux forces exercées au sol.
- Phase d’amortissement : phase essentielle où les muscles se contractent de manière isométrique. Elle sert de transition critique entre l’étirement (phase excentrique) et la contraction (phase concentrique), permettant une gestion optimale des forces.
- Phase de rebond : l’énergie emmagasinée pendant les phases précédentes est restituée par une contraction rapide involontaire au départ par activation du réflexe myotatique.
- Phase de momentum final : expression de la force conentrique pour décoller et préparer la phase suivante.
Fondements physiologiques de la pliométrie
Les exercices pliométriques stimulent principalement les fibres musculaires de type II (fibres à contraction rapide), qui sont responsables de la production de mouvements rapides et puissants. Ces fibres sont activées lors de contractions musculaires intenses et rapides, favorisées par le recrutement simultané de nombreuses unités motrices. En outre, la pliométrie sollicite le système tendineux, augmentant ainsi la rigidité et la réactivité des tendons, ce qui améliore la transmission de la force musculaire aux os.
Selon des études publiées par Bosco et plus tard Schmidtbleicher , l’entraînement pliométrique peut augmenter la force réactive, ce qui permet au système neuromusculaire de réagir plus rapidement aux changements de direction et aux sollicitations physiques soudaines.
En renforçant les muscles, les tendons et les os, la pliométrie contribue non seulement à la performance athlétique mais aussi à la prévention des blessures.
La pliométrie fait donc appel aux structures élastiques (tissus de soutien), aux structures contractiles (muscles et complexe muscle-tendon) mais surtout au système nerveux (central et périphérique)
Rôle du Système Musculaire et Tendineux
Le succès des exercices pliométriques repose sur la capacité des muscles et des tendons à stocker et à libérer de l’énergie élastique. Lorsque les muscles s’étirent rapidement pendant la phase excentrique, l’énergie élastique est stockée dans les tissus de soutien, en particulier les tendons.
Ce processus semble fonctionnait comme un ressort : il emmagasine de l’énergie lorsqu’il est compressé et la restitue lors de son retour à la forme initiale. Mais en réalité le système nerveux joue un rôle primordial sur ces mouvements rapides. Réduire le mouvement à une simple mécanique ignore la complexité et la richesse de la réalité physiologique.
Attention cependant aux état pathologiques des tendons qui perdent leur capacités de transmissions des forces, nous en discuterons dans un chapitre dédié aux tendinopathies.
Des recherches ont montré que l’entraînement pliométrique favorise l’adaptation des tendons en augmentant leur rigidité et leur capacité à absorber et libérer de l’énergie rapidement. Cette adaptation améliore la réactivité et l’efficacité des mouvements explosifs. De plus, la répétition régulière des exercices pliométriques renforce les structures osseuses, car les impacts contrôlés stimulent la densité osseuse, réduisant ainsi les risques de fractures et d’autres blessures.
Cependant le volume et l’intensité de l’entrainement en pliométrie est à manager car on retrouve de nombreuses problématiques de tendons dans les sports avec un haut volume de saut.
La pliométrie est bien plus qu’une simple méthode d’entraînement de saut. Elle repose sur des principes physiologiques complexes qui impliquent la coordination efficace entre les structures élastiques et contractiles. En maîtrisant le cycle d’étirement-raccourcissement et en renforçant les structures musculaires et tendineuses, les athlètes peuvent améliorer considérablement leur puissance et leur explosivité.
La pliométrie est donc un outil précieux pour tous ceux qui cherchent à améliorer leurs performances athlétiques tout en renforçant leur résilience physique.
La physiologie derrière la pliométrie : modèle neuro-mécanique
La pliométrie repose sur des mécanismes physiologiques complexes qui permettent aux muscles de produire des mouvements puissants et explosifs. Pour comprendre comment les exercices pliométriques améliorent la détente verticale, il est crucial de se pencher sur la physiologie musculaire impliquée, notamment le rôle des fibres musculaires, la contraction musculaire et les adaptations neuromusculaires.
1. Les Fibres Musculaires et Leur Rôle
Les muscles squelettiques sont constitués de plusieurs types de fibres (ici nous en distinguerons 2 essentiellement) : les fibres de type I (à contraction lente) et les fibres de type II (à contraction rapide). La pliométrie sollicite particulièrement les fibres de type II, qui sont responsables de la production de mouvements rapides et puissants.
- Fibres de Type IIa : Ces fibres combinent des caractéristiques de force et d’endurance. Elles peuvent soutenir des efforts explosifs tout en étant capables de résister à la fatigue plus longtemps que les fibres de type IIx.
- Fibres de Type IIx : Les plus rapides et les plus puissantes, elles produisent des contractions brèves mais extrêmement fortes. Ces fibres sont essentielles pour les performances de haute intensité, comme les sauts verticaux ou les sprints.
2. Adaptations neuromusculaires
Le système nerveux joue un rôle essentiel en pliométrie, car il permet une coordination rapide et efficace des mouvements explosifs. Lors d’exercices pliométriques, les propriocepteurs (situés dans les muscles, les tendons et les articulations) détectent les changements de tension et de position, envoyant des signaux au système nerveux central (SNC).
Celui-ci traite rapidement ces informations et active les voies motrices pour coordonner une contraction musculaire puissante et synchronisée. Grâce aux réflexes myotatiques (réflexes d’étirement), le SNC optimise la réactivité et la vitesse de contraction des muscles, permettant des mouvements explosifs et efficaces. Ce circuit nerveux rapide et précis est fondamental pour maximiser la performance en pliométrie.
- Amélioration du recrutement des fibres musculaires
- La répétition des exercices pliométriques accroît la capacité du système nerveux à recruter un plus grand nombre de fibres musculaires en un temps réduit, maximisant ainsi la force produite.
- Coordination intermusculaire
- Les exercices pliométriques améliorent la coordination entre différents muscles pour fonctionner en synergie. Par exemple, lors d’un saut vertical, les quadriceps, les mollets et les muscles du tronc collaborent pour générer le saut le plus efficace possible.
- Réduction de la phase d’amortissement
- L’entraînement pliométrique diminue la durée de la phase d’amortissement (la brève pause entre la phase excentrique et concentrique). Cela permet de libérer l’énergie élastique plus rapidement, augmentant ainsi la puissance du saut.
Les recherches ont montré que les athlètes entraînés en pliométrie présentaient une meilleure synchronisation des contractions musculaires, ce qui a conduit à une augmentation significative de la puissance explosive et de la détente verticale.
3. Adaptations tendineuses et résistance
Le tendon joue un rôle clé en pliométrie grâce à sa capacité à stocker et transférer de la force de manière rapide et efficace. Sa rigidité permet de restituer l’énergie élastique accumulée lors de l’étirement pendant la phase de charge, optimisant ainsi la puissance du mouvement lors du saut. Les tendons agissent comme des ressorts, transférant la force générée par les muscles vers les os pour produire un mouvement explosif.
Ils contiennent également des propriocepteurs, comme les organes tendineux de Golgi, qui détectent la tension et informent le système nerveux central. Cela active des réflexes de protection et de coordination, ajustant la contraction musculaire pour maximiser l’efficacité et prévenir les blessures.
L’entraînement, notamment en pliométrie et en musculation, entraîne des adaptations physiologiques importantes au niveau des tendons, améliorant leur performance et leur résistance. Voici comment le tendon s’adapte :
- Augmentation de la rigidité : L’entraînement régulier, surtout avec des exercices impliquant des charges élevées et des mouvements explosifs, augmente la rigidité des tendons. Cela permet un meilleur stockage et transfert de l’énergie élastique, rendant les mouvements plus efficaces et puissants.
- Renforcement de la structure : Les fibres de collagène (protéines principales constituant les tendons) se réorganisent et se densifient, augmentant ainsi la résistance à la tension. Les exercices répétitifs renforcent cette structure, la rendant plus solide face aux sollicitations mécaniques.
- Synthèse accrue de collagène : L’entraînement stimule la production de collagène, favorisant la réparation et la croissance des fibres tendineuses. Cela permet aux tendons de mieux s’adapter aux charges répétées et de se renforcer au fil du temps.
- Amélioration de la circulation sanguine : Bien que les tendons soient moins vascularisés que les muscles, l’entraînement peut favoriser une meilleure vascularisation, améliorant l’apport de nutriments et facilitant la récupération et la réparation des tissus tendineux après l’effort.
- Adaptations neuromusculaires : Les tendons deviennent plus réactifs aux stimuli nerveux grâce à l’amélioration de la coordination neuro-musculaire, ce qui optimise la synchronisation entre les muscles et les tendons pour des contractions plus rapides et plus efficaces.
Nous verrons dans l’article suivant tous les termes et définitions en lien avec la pliométrie. Vous ne serez plus perdus lors de vos lectures d’articles ou d’ouvrages en lien avec ce thème.